Afrique du Sud

Projet d’alphabétisation familiale

Profil du pays

Population : 47 432 000 (chiffres ISU 2005)
Population vivant avec moins de 2 USD par jour : 34 % (chiffres ISU 2005)

Contexte

On estime qu’en Afrique du Sud entre 7,4 et 8,5 millions d’adultes sont fonctionnellement analphabètes et entre 2,9 et 4,2 millions de personnes ne sont jamais allées à l’école. En Afrique du Sud, un million d’enfants vivent dans un foyer où aucun adulte ne sait lire. Une étude récente a révélé qu’un peu plus de 50 % des familles sud-africaines ne possèdent aucun livre de lecture récréative ou de loisir. Il n’est donc peut-être pas très surprenant qu’une évaluation nationale réalisée en 2003 par le ministère de l’Éducation révèle que la moyenne des notes des enfants de « Grade 3 » (niveau CE2) pour la compréhension de lecture et l’écriture était seulement de 39 %.

Le Projet d’alphabétisation familiale (Family Literacy Project, FLP) est basé dans la région du Drakensberg au sud du KwaZulu-Natal, qui compte une population de 300 000 habitants. Le taux de chômage est actuellement de 41 % et 66 % des foyers vivent avec moins de 800 ZAR par mois. La plupart des gens n’ont pas accès à l’électricité ni à des sanitaires convenables, ce qui entraîne de graves conséquences dans une région où l’on estime que 30 % de la population est séropositive.

Ce projet s’adresse aux familles afin de répondre au problème du faible taux d’alphabétisation chez les enfants en âge préscolaire et à l’école primaire, et de remédier au manque de confiance que les parents éprouvent quant à leur capacité à aider leurs enfants. Étant donné que les parents (ou bien les personnes agissant en tant que tels) sont les premiers éducateurs des enfants, et les plus importants, l'approche d'alphabétisation familiale soutient tant les adultes que les enfants.

Programme

Le FLP a été créé en 2000 en réaction à des chiffres qui montraient que l’alphabétisation des enfants en âge préscolaire ne s’améliorait pas, malgré les interventions gouvernementales dans le secteur de la petite enfance. Des réunions mensuelles ont tout d’abord été organisées avec les parents des enfants en âge préscolaire afin de les aider à renforcer leur rôle dans le développement de l’alphabétisation chez leurs jeunes enfants. À la fin de l’année, les parents avaient davantage confiance dans leur capacité à aider leurs enfants, quel que soit leur propre niveau d’alphabétisation. Ces parents, ainsi que d’autres parents de la région, demandèrent au FLP des cours d’alphabétisation pour adultes. Chaque groupe choisit un membre de sa communauté pour participer à la formation organisée par le FLP. Ces femmes ont depuis été formées à l’alphabétisation pour adultes (dans leur langue maternelle et en anglais en deuxième langue) ainsi qu’à l’alphabétisation des jeunes enfants et à l’approche participative Reflect. La participation des membres du groupe est importante car le FLP accorde une grande valeur aux connaissances locales, qui doivent sans cesse être enrichies par toute information nouvelle.

L’approche du FLP combine à présent ces trois aspects et onze animateurs travaillent directement avec 197 adultes, 479 enfants scolarisés en primaire et 116 adolescents pour atteindre les objectifs suivants :

Les groupes d’adultes privilégient le développement des compétences de lecture et d’écriture, le partage des connaissances locales et l’introduction de nouvelles informations si nécessaire. Les sujets couverts dans ces groupes sont par exemple les droits et la protection de l’enfance, la santé des femmes, les questions environnementales, l’organisation de comités ou la tenue d’un budget. Les groupes d’adultes parlent régulièrement des questions associées aux enfants, réfléchissent aux moyens de soutenir leur développement et s’amusent avec eux en regardant ou en lisant des livres.

Le FLP souligne l’importance du rôle des parents/assistants parentaux en tant que premiers éducateurs des enfants, et les adultes du projet sont soutenus dans ce rôle. Certains membres du groupe rendent à leur tour visite à leurs voisins dans le cadre du programme de visite à domicile du projet. Les 69 visiteurs à domicile diffusent des informations sur la façon de jouer avec les enfants et de prendre soin de leur santé, par exemple. Cette innovation a conduit à une formation supplémentaire afin que les membres du groupe puissent promouvoir l’alphabétisation et la santé des jeunes enfants de façon amusante et interactive directement au domicile des familles.

Le principal obstacle au bon fonctionnement des sessions de groupe provient de la charge de travail des membres. Les femmes manquent les sessions lorsqu’elles doivent couper les chaumes, refaire la toiture en chaume de leur maison ou reconstruire/plâtrer les murs. Si une initiative financée par le gouvernement a besoin d'ouvriers à court terme, les membres du FLP sont souvent les premiers à vouloir travailler et ils s’absentent donc des sessions pendant la durée du contrat. L’état des routes dans cette région très rurale pose un tout autre problème. Les routes sont mauvaises même quand les conditions météorologiques sont bonnes. Lorsqu’il pleut ou qu’il neige, elles sont souvent impraticables, ce qui perturbe le soutien que le projet apporte aux animateurs en leur rendant visite une fois par mois.

Les groupes d’adolescents et d’enfants scolarisés en primaire explorent de nombreuses questions qu'ils mettent en relation avec le plaisir des livres et de la lecture. Les sujets abordés sont souvent les mêmes que ceux des groupes d’adultes, ce qui donne aux familles la possibilité d’en parler ensemble à la maison.

Le problème des faibles niveaux d'alphabétisation chez les adultes et chez les enfants est exacerbé par le manque de livres dans la région. Pour résoudre ce problème, le projet a mis en place trois bibliothèques communautaires et huit bibliothèques itinérantes gérées par les animateurs de projet avec l’aide des membres du groupe.

En outre, le personnel du projet a créé des supports d'apprentissage ainsi que des livres faciles à lire disponibles en zoulou et en anglais. Les sujets couverts par ces livres comprennent le développement de l’alphabétisation chez les jeunes enfants, l’éducation, la séropositivité et le sida ainsi que la résilience. Les animateurs reçoivent toutes les unités (plans de leçon) ainsi que des affiches et des brochures le cas échéant. Le projet fournit la papeterie aux groupes d’adultes, d’adolescents et d’enfants. Les membres des groupes peuvent continuer à participer au projet tant qu’ils le souhaitent, car aucune date de fin n’a été déterminée pour le programme.

Tous les animateurs et membres des groupes proviennent de la communauté dans laquelle les groupes opèrent. Les membres des groupes, toutes des femmes, ont de 21 à 79 ans, l’âge moyen étant de 48 ans.

Leçons apprises

La leçon la plus importante est que les enfants soutenus par leurs parents obtiennent généralement de bons résultats à l’école et que cela encourage les adultes à poursuivre ces efforts. Le FLP a également appris que des animateurs bien soutenus sont essentiels au succès de ce programme.

L'arrivée de nouveaux membres ne doit pas empêcher le FLP de continuer à centrer ses efforts sur les familles. Les premiers membres, dont beaucoup participent toujours au projet, voulaient aider leurs jeunes enfants tout en développant leurs propres compétences de lecture et d'écriture. Il est important que les femmes qui rejoignent aujourd’hui ce projet maintenant établi et reconnu comprennent sa mission et sa vision, et y souscrivent.

Danisile Gladys Duma (née en 1948) participe régulièrement au projet depuis les premières réunions d'alphabétisation familiale qui avaient eu lieu à Lotheni. En 2003, elle a écrit (en zoulou) :

« Je suis née à KwaNoguqa et j’ai grandi à Mpendle. J’ai commencé l’école et je me suis arrêtée en 2e classe. J’ai arrêté parce que nous n’avions rien. Je suis restée chez moi malgré mon désir d'apprendre, mais je devais m'occuper du bétail.

Je me suis mariée à 15 ans…Au cours des neuf ans (de mariage), j’ai eu une petite fille…C’est mon seul enfant. Ma fille a grandi et est allée à l’école. Je souhaitais que ma fille reçoive une éducation et qu’elle ne vive pas les mêmes expériences que moi, car j’ai eu une vie très triste par manque d'éducation.

En 2001, une école pour adultes a été créée et je me suis inscrite. Aujourd'hui ma vie est intéressante et je suis libre. Je remercie cette école pour adultes ».

Le FLP sait que si les compétences de lecture et d'écriture ne sont pas utilisées régulièrement, elles peuvent être difficiles à entretenir. C’est pourquoi les membres du groupe sont encouragés à contribuer au bulletin du projet, à avoir des correspondants, à écrire des messages destinés aux tableaux d’affichage de la communauté et à rédiger un journal avec leurs enfants.
Les sessions de groupe pour adultes sont annoncées de bouche à oreille et sont ouvertes à tous. Les taux d'abandon du FLP sont faibles et lorsque les membres doivent s’absenter, ils envoient leurs excuses et donnent une explication. Il ne fait aucun doute que les membres ont envie de rester dans le programme (la moyenne est de 3,5 ans pour les groupes en place depuis 2000) parce qu’ils sont traités avec respect et que le programme est important pour eux et pour leurs familles.

L’alphabétisation familiale peut être développée de différentes façons et peut être bénéfique tant pour les adultes que pour les enfants. L’expérience du FLP a montré que le regroupement participatif de l’alphabétisation des adultes et des jeunes enfants peut fonctionner. C’est pour cela que le personnel du FLP se réunit avec d’autres organisations et organismes gouvernementaux, afin d’examiner les façons les plus appropriées de proposer l’alphabétisation familiale dans différents contextes. Pour ce faire, le PAF tire parti de ses expériences et partage les leçons apprises avec les autres. Les femmes qui participent au projet depuis ses débuts sont maintenant des animatrices compétentes, mais elles sont aussi capables de prendre la parole lors de réunions et de conférences ainsi que de diriger des cours de formation en dehors de leur propre région. Elles ont davantage confiance en elles et le principal défi auquel elles sont maintenant confrontées est de gérer leur emploi du temps de sorte à pouvoir répondre aux différentes demandes.

Le projet est évalué chaque année et les derniers rapports sont disponibles sur le site Internet du FLP. Les recommandations suivant les évaluations sont prises au sérieux et sont suivies chaque année par un évaluateur externe. Différentes approches d’évaluation ont été utilisées, dont par exemple la narration, les photos et les récits, les groupes de discussion, les entretiens et les réflexions des membres du groupe sur leurs propres pratiques.

Le travail des ONG dépend en grande partie du financement des donateurs, et les donateurs qui modifient leurs priorités peuvent représenter un véritable défi pour une ONG qui doit alors rechercher d’autres donateurs. Par exemple, le budget 2007 du FLP avoisine les 2 000 000 ZAR, mais il est impossible d’extraire de ce total le coût par apprenant, étant donné que le personnel très limité de 2 personnes à plein temps et de 11 personnes à temps partiel participe non seulement au travail de groupe, mais aussi à la création de supports d’apprentissage, à l’assistance de proximité, à la collecte de fonds et à la gestion. En outre, le projet fait appel aux services d’un expert de la santé et à des évaluateurs externes dont le coût vient s’ajouter au budget global. Les donateurs ne s’engagent pas à long terme, et certains n’informent pas les organisations suffisamment à l’avance en cas de modification de leurs critères de financement. Cela représente une véritable gageure pour le FLP. Cependant, alors que de nombreuses personnes – convaincues de l’importance du transfert intergénérationnel des connaissances, des compétences et du soutien – travaillent à l’amélioration de l'alphabétisation familiale en Afrique du Sud, ainsi que dans de nombreux autres pays, il est possible que des ressources techniques et financières soient disponibles à l'avenir.

Contact

Snoeks Desmond
Directrice
Family Literacy Project
3 Achadhu
337 Montpelier Road
Durban 4001
Afrique du Sud
Snoeks@global.co.za

Lynn Stefano
Responsable du développement du projet
Family Literacy Project
3 Achadhu
337 Montpelier Road
Durban 4001
Afrique du Sud
stefanola@telkomsa.net
www.familyliteracyproject.co.za