Mali

Programme de Développement Communautaire

Jeunesse et Développement

Profil du pays

Population : 13 518 000 (2005)
Population se trouvant en-dessous du seuil national de pauvreté : 63.8 % (1999 UNSD)
Taux d’alphabétisation des adultes : 24 % (2003)
Taux de prévalence du VIH chez les adultes (15-49 ans): 1.9 % (2003)

Contexte

Le Mali, un des pays les plus pauvres du monde, a lancé depuis 1993 un vaste chantier de décentralisation afin d’assurer un développement harmonieux et durable. Les collectivités territoriales ont été mises en place à travers l’autodétermination. Toutefois, le fonctionnement efficace de ces collectivités est confronté à un certain nombre de contraintes. Entre autres, on peut citer :

C’est dans ce contexte que Jeunesse & Développement (J&D), une ONG nationale ayant pour mission essentielle : l’éducation, la formation et l’information, a commencé ses activités en région rurale avec comme objectif la facilitation de leur auto promotion par les communautés elles-mêmes. J&D, soucieuse de se mettre en premier lieu à l’écoute de ses futurs partenaires et ne voulant pas commencer par l’introduction de solutions toutes conçues aux problèmes de développement, a mené en 1999 une étude du milieu d’un mois dans la zone du programme. Elle a permis de poser les problématiques au niveau de 4 domaines : la santé, l’environnement, la situation des femmes et l’alphabétisation et ses résultats ont servi de base au lancement d’un programme en 2000. Le programme a démarré avec l’alphabétisation et la santé grâce à un financement de l’Ambassade Britannique en 2000. Progressivement, l’ONG a pu mobiliser d’autres partenaires pour mettre en œuvre les autres volets du programme.

Un pair éducateur en animation avec son groupe

Programme

Le programme vise les femmes, les hommes, les élèves, les enfants n’allant pas à l’école et les conseillers locaux, dans les communes de Sibirila, Yinindougou et Kouroulamini à Sikasso.

Ses objectifs sont :

Le modèle conceptuel du programme est basé sur les valeurs et les principes de l’éducation des adultes. L’ONG utilise les approches Reflect et STAR dans ce programme lesquels comprennent la connaissance, les compétences interpersonnelles, la participation et le renforcement de capacité. Ceci est rendu opérationnel à travers l’approche STAR (Stepping Stones et Reflect) qui est maintenant largement utilisée dans beaucoup de communautés africaines. Reflect combine les outils et techniques de la recherche participative avec les techniques de communication et l’ensemble se fait dans le respect des principes et des valeurs de la philosophie de Paolo Freire, alors que Stepping Stones est un outil de formation et de communication qui est aussi basé sur les méthodes participatives et est développé pour aborder la vulnérabilité des jeunes et des femmes devant les décisions se rapportant à leur comportement sexuel. Cette approche donne à chacun les moyens de réfléchir sur bon nombre de facteurs qui affectent notre santé sexuelle comme les relations genres, les traditions locales, les attitudes devant la sexualité, l’argent et l’alcool. Dans Reflect, tout comme dans Stepping Stones, on fait la promotion de la perspective genre.

Une apprenante en train de résoudre un problème au tableau

La méthodologie se base sur la mise en place des cercles Reflect /STAR au sein de chaque village ou le programme intervient. Typiquement, un cercle regroupe une trentaine de membres venant d’organisations communautaires qui ont des responsabilités importantes et la volonté d’apprendre à lire et écrire sur la base des analyses de leurs centres d’intérêts. Le plus souvent, ces intérêts touchent des volets tels que la santé, l’éducation, l’environnement et la citoyenneté. Ces cercles se rencontrent plusieurs fois par semaine (ce sont les participants qui décident de la fréquence des séances).

La première partie de la séance concerne les échanges et les analyses sur un thème précis à travers la construction d’un outil visuel qui facilite la participation de tout le monde, alphabétisé ou non alphabétisé, hommes et femmes, jeunes et vieux. A cette étape, la prévention du VIH/SIDA fait partie des thèmes. La deuxième partie de la séance est consacrée à l’alphabétisation. L’outil et les contenus des analyses sont la base de l’apprentissage – il n’y a aucun besoin d’abécédaire ou d’autres ressources écrites, ce qui diminue les frais des matériels par rapport à l’approche classique. En plus, le fait que l’apprentissage soit basé sur les idées émergeant des échanges le rend assez rapide. Ces groupements servent de noyaux au sein des communautés qui génèrent des idées d’action afin de faire face aux défis analysés lors des séances. Au moment d’exécuter les idées d’action, les autres membres de la communauté, parmi lesquels les autorités traditionnelles et administratives, sont impliqués. De cette façon, la population est à l’origine de la conception et la mise en oeuvre des activités de développement. L’ONG joue un rôle d’appui, de conseil et d’accompagnement. Il y a un transfert de compétence par rapport à l’alphabétisation et aussi l’organisation, le montage de projets, la mobilisation de ressources et surtout l’importance de la participation de tout le monde, y compris des couches marginalisées.

Les facilitateurs (Deux par cercle d’apprentissage) sont recrutés dans les communautés sur la base de critères discutés et agrées lors de l’étude. Ils sont endogènes car sont natifs des localités couvertes. Ils sont recrutés pour une durée indéterminée car ils continuent les activités même après la fin du financement de l’ONG. En plus de la facilitation, ils jouent un rôle de leadership dans le plaidoyer local et dans la mise en œuvre des activités du programme.

Par rapport à la formation initiale, les facilitateurs reçoivent 15 jours de formation en REFLECT, 8 jours en STAR (santé de la reproduction et VIH/SIDA), 5 jours en techniques de montage de projet. Des recyclages sur des thèmes identifiés lors des suivis/évaluations sont organisés au moins 2 fois par an et il y a le forum trimestriel des facilitateurs qui leur permet d’échanger sur les réussites, les difficultés ainsi que les solutions possibles. Des visites d’échanges informelles sont encouragées pour leur offrir des soutiens pratiques.

Pour assurer un environnement lettré qui favorise et appuie l'alphabétisation initiale, une série de matériels sonores et visuels est disponible dans la bibliothèque communautaire. Un membre du comité de l'éducation civique garde une sélection de documents sur ce volet chez lui. Ceux-ci contiennent les informations sur la décentralisation et les questions sur la démocratie, et sont à la disposition des villageois. En 2003, les facilitateurs ont aussi lancé un journal communautaire, en réaction à un manque de matériels de lecture spécialement conçus. Un comité de rédaction composé des membres des comités de l'éducation civique a été mis en place. Les efforts pour mobiliser les communautés à améliorer leur situation individuelle et communautaire ont abouti à beaucoup de résultats. Au niveau de la communauté, il y a maintenant un centre de l'action civique dans chaque village. Ces centres comprennent une bibliothèque, un espace d’apprentissage pour l'acquisition des compétences en lecture, écriture et en calcul, un espace d'activité légal, et un centre vidéo avec les cassettes sonores et audiovisuelles. A côté de ces centres d'action civique, il y a des Centres de Santé Communautaire (CSCOMs) avec un niveau élevé de participation de la communauté, c’est à dire un total de 3 075 membres avec 80% de cartes d'adhésion par les chefs de famille. Il y a aussi à côté des comités villageois liés à Reflect ci-dessus mentionnés, des Comités villageois de santé et d’hygiène, ce qui montre la grande participation de la communauté sur bons nombres de questions. Quatre-vingts pour cent des enfants qui étaient dans le système éducatif non formels ont été acceptés et sont allés dans le système formel. Quarante cercles Reflect ont été établis avec 1 080 membres qui sont alphabétisés tous les deux ans, parmi lesquels 60% de femmes.

Grâce à une augmentation dans la proportion de personnes capables de reconnaître et traiter les maladies infantiles (malnutrition, diarrhée, infections respiratoires aiguës, malaria) et les ISTs/VIH/SIDA, l’accès aux services et facilités médicales s’est amélioré. Il y a des ASACOs (Associations de Santé Communautaire) en place qui a) impliquent la population locale dans la coordination et le financement de l'établissement et aussi la gestion des CSCOMs; b) approchent d’autres partenaires pour chercher le financement pour la mise en place et la gestion des CSCOMs ; et c) fournissent les soins de santé (survie de l'enfant, consultations pré et post-natales, la campagne de vaccination, les soins préventifs et fondamentaux, la prévention contre les ISTs/VIH/SIDA) dans les régions importantes.

Démonstration de l’utilisation du préservatif par un pair éducateur

Leçons apprises

Il est clair que la participation des communautés dans la mise en oeuvre d'un programme joue un rôle essentiel dans la consolidation de la connaissance acquise, même après que l’ONG ne sera plus impliquée, du moment qu'un plan durable impliquant l’Etat, les communes et les chefs communautaires est mis en place. Le programme a aussi démontré que vu que les populations deviennent de mieux en mieux informées au sujet des lois et des processus qui affectent leurs vies et leur environnement, elles commencent à jouer un rôle plus actif dans les prises de décision et les processus de gestion. Mais cela veut dire aussi qu'il y a un besoin continu d’asseoir la capacité de la population, des autorités et des organisations locales afin qu’elles puissent acquérir plus de responsabilités et de connaissance.

La rémunération pour les facilitateurs constitue un grand défi. D’habitude, elle provient des activités génératrices de revenu de chaque cercle et est très peu élevée étant donné le besoin croissant de personnes qualifiées. Malheureusement, beaucoup d'organisations paient des directeurs et des formateurs et refusent toujours de donner des salaires aux facilitateurs sous prétexte qu'ils sont des volontaires. Cette situation affaiblit le programme, vu que les meilleurs facilitateurs choisissent de partir et de chercher du travail dans des secteurs mieux payés.

On doit traiter la question du manque d'une structure claire et précise pour former des partenariats entre les services de l'état et les ONG parce que des partenariats avec des principes clairs de responsabilité et de contribution doivent être établis pour permettre qu’on partage les leçons et organise les activités d'une manière plus cohérente.

Contact :

Diarra Mahamadou Cheick
Jeunesse et Développement
Lafiabougou Rue 426 / Porte 286
Bamako / Mali
diarra_sama@yahoo.fr
www.jeunesse-et-developpement.org