Mali

Appui à la qualité et à l’équité de l’éducation

World Education Mali

Profil du pays

Population : 13 518 000 (2005)
Taux d’alphabétisation des adultes : 24 % (2003)
Population au-dessous du seuil national de pauvreté : 63.8 % (1999)

Contexte

Le programme World Education Mali « Appui à l’amélioration de la qualité et de l’équité de l’éducation » (AQEE) opère dans six régions du Mali : Kidal, Gao, Tombouctou, Ségou, Sikasso et Koulikoro. Dans ces régions, le programme cible 105 communes où vivent 2 430 676 habitants, qui représentent environ un quart (24,60 % ) de la population totale du Mali. Plus spécifiquement, le programme couvre 700 écoles (300 écoles publiques, 213 écoles communautaires, 103 écoles medersa et 4 écoles privées), 8 académies d’enseignement et 17 centres de formation pédagogique.

Dans le cadre du programme AQEE, l’élimination de l’analphabétisme est intégrée aux initiatives visant à augmenter la participation de la communauté pour soutenir les écoles et l’enseignement aux enfants. Les partenaires clés, en l’occurrence, sont membres de comités de gestion scolaire, membres d’associations de parents (associations de mères en particulier) et des chefs de communautés illettrées qui ont formé un partenariat avec des écoles.

Le plus important est que le programme s’aligne sur le plan stratégique décennal du ministère de l’Éducation malien (appelé PRODEC), qui sert d’agent de changement et qui facilite : a) l’amélioration des méthodes d’enseignement et de formation des enfants ; b) la formation des professeurs avant et pendant le service ; c) une participation accrue des parents et des communautés à la gestion scolaire.
Le dernier composant du programme nécessite une formation d’alphabétisation des parents, pour leur permettre de suivre le travail scolaire de leurs enfants, qui reçoivent un enseignement bilingue, en français et dans une langue nationale.

Programme

En 1999, World Education Mali a mis au point et a commencé à appliquer des programmes d’alphabétisation qui aident à renforcer la participation de la communauté à des activités éducatives. En Avril 2002, les professeurs, les membres des communautés et le personnel de l’ONG ont été regroupés pour écrire des documents d’alphabétisation et, en 2003, World Education a commencé à intégrer ces documents d’alphabétisation dans le programme AQEE financé par l’USAID.

Ce programme, destiné à la communauté malienne, a les buts spécifiques suivants :

L’objectif spécifique du programme AQEE est de fournir aux parents et aux membres des organisations basées dans les communautés des compétences de lecture et d’écriture de base, dont ils besoin pour contribuer à la gestion de leur école primaire locale et à l’éducation de leurs enfants. Un autre objectif principal est de s’assurer que les parents et leurs enfants atteignent un niveau d’alphabétisation de base. L’accent mis sur l’alphabétisation des adultes a pour but principal de compléter l’amélioration de la qualité de l’enseignement pour les enfants. Les parents qui savent lire et écrire sont mieux à même de surveiller et de participer au travail et aux activités scolaire de leurs enfants. De plus, ils peuvent participer à la création et la mise en œuvre des plans d’amélioration scolaire.

Les membres de la communauté recrutent les participants au programme qui répondent aux critères suivants : a) ils participent volontairement ; b) ils sont membres de la communauté dans laquelle a lieu le programme d’alphabétisation ; c) ils sont actuellement illettrés ou ont abandonné l’éducation officielle à un âge précoce ; d) ils sont membres d’une structure de gestion scolaire (comité de gestion scolaire ou association parent/étudiant). Tandis que d’autres programmes peuvent proposer aux participants une incitation financière, les participants à World Education ne reçoivent pas de motivation financière, ce qui est important pour la viabilité à long terme du programme. De plus, World Education s’est efforcé de permettre aux membres élus d’agir comme représentants de la communauté et d’assumer la responsabilité de sélectionner les formateurs et les participants et de gérer les centres d’alphabétisation.

Le programme emploie la méthodologie Sanmogoya . Élaborée par World Education, cette méthodologie est basée sur l’action, ce qui signifie que les participants catalysent le changement. D’autre part, elle utilise le contenu qui convient le mieux aux priorités et aux besoins de la communauté participante. Les formateurs emploient un processus de résolution de problèmes qui cherche à aider les participants à résoudre des problèmes concrets tout en apprenant à lire, écrire et calculer. Les facilitateurs invitent les apprenants à dialoguer en s’appuyant sur les supports visuels, en leur posant une série de questions telles que : « À quel(s) problème(s) ces personnes sont-elles confrontées ? Quelles sont les causes de ce(s) problème(s) ? Votre communauté ou une communauté voisine rencontre-t-elle le même problème ? Que peut-on faire pour éviter ou résoudre ce problème ? » Grâce à la méthodologie Sanmogoya, les apprenants développent une meilleure compréhension des problèmes liés à l’éducation dans leur communauté et identifient des solutions pertinentes pour les traiter en classe.

Il y a deux facilitateurs (un homme et une femme) par classe de 25 à 30 participants. La communauté recrute les facilitateurs d’après les critères suivants : a) ils doivent avoir reçu une éducation de base ; b) ils sont membres de la communauté ; c) ils sont fiables, disponibles et sociables ; d) ils sont en accord avec les conditions de motivation de la communauté. C’est pourquoi le programme d’emploi est déterminé par la communauté spécifique dans laquelle le facilitateur travaille.

Les cours sont dispensés dans l’une des trois langues du Mali (Bamanankan, Tamasheq et Songhaï), selon la langue dominante de la communauté, et ont lieu quatre fois par semaine, pendant deux heures, pour renforcer les leçons apprises. L’alphabétisation de base nécessite un total de 150 heures, qui s’étalent généralement sur une période de six mois. Par ailleurs, le programme intègre des leçons qui portent sur l’égalité des sexes et sur le VIH/sida.

Les centres d’alphabétisation utilisent des livrets de lecture, d’écriture et de maths, ainsi que des boîtes d’images conçues pour l’éducation de base et la post-alphabétisation, accompagnées d’un guide d’éducation de base et d’enseignement de post-alphabétisation pour les formateurs en lecture, écriture et maths. Les formateurs complètent ces outils avec des jeux de lettres et le « Waligana » ou tableau de nombres. Spécialement pour les femmes, les livrets de post-alphabétisation portent sur l’éducation, la santé, l’environnement, la gestion du foyer et les activités lucratives.

Par ailleurs, World Education a introduit un outil d’alphabétisation innovant, suite à un partenariat public/privé appelé « Kinkajou », du nom d’un animal nocturne capable de voir dans le noir. Ce partenariat entre USAID, World Education, Design that Matters (affilié avec le Massachusetts Institute of Technology) et le ministère de l’Éducation a permis de tester une technologie adéquate, simple et locale, qui permet aux membres de communautés de régions à prédominance rurale d’apprendre à lire, écrire et compter dans de bonnes conditions la nuit. Ce système se compose d’un panneau solaire prévu pour charger tous les jours une batterie, qui alimente un projecteur pour les cours du soir. Ce projecteur est utilisé en conjonction avec la méthodologie Sanmogoya. Une évaluation indépendante a trouvé des impacts positifs dans les centres d’alphabétisation utilisant les projecteurs Kinkajou. Notamment, les participants des centres Kinkajou ont appris les leçons deux fois plus vite que ceux des centres de contrôle et présentaient de faibles taux d’abandon (66,5 % de moins parmi les femmes).

Enseignements tirés

Du moment où il a été introduit, durant l’année académique malienne 2003-2004 jusqu’à fin 2006, le programme d’alphabétisation de World Education a réussi à alphabétiser 17 637 apprenants de base (dont 6 524 femmes) et 6 831 apprenants de post-alphabétisation (dont 2 260 femmes). World Education évalue les participants au programme d’alphabétisation grâce à des tests d’alphabétisation en début, en milieu et en fin d’année. Ils suivent la grille d’évaluation établie par le bureau d’éducation non formelle du ministère de l’Éducation, ainsi que l’évaluation interne et externe du programme AQEE.

Les parents et les membres de la communauté qui viennent d’acquérir des compétences de lecture et d’écriture peuvent les mettre à profit en participant à 756 comités de gestion scolaire et/ou associations de parents. La participation de la communauté au système éducatif continue de s’améliorer, avec 1 204 réunions de communauté organisées pour discuter des résultats scolaires et mettre au point des plans de construction de capacité en 2004-2005 et en 2005-2006. Par ailleurs, le programme construit un environnement d’alphabétisation lié aux langues nationales.

World Education a remarqué une amélioration dans la qualité de la gestion scolaire par les participants au programme d’alphabétisation. De plus, les participants ont mieux surveillé l’éducation de leurs enfants, à la maison et à l’école. Par ailleurs, la communauté est mieux sensibilisée aux questions d’hygiène personnelle, de médecine reproductive et de VIH/sida. Les membres des communautés participantes ont témoigné d’une forte volonté de s’alphabétiser mais ont noté que la communauté ne peut pas atteindre des taux d’alphabétisation supérieurs sans le soutien d’acteurs et de ressources clés, notamment par la formation continue de professeurs et des apports matériels.

Les membres de la communauté ont été chargés de gérer les centres d’alphabétisation depuis le début du programme, tandis que les centres régionaux de formation pédagogique et les académies d’enseignement apportent un soutien technique et un suivi des activités de terrain.

La clarification des rôles et des responsabilités des acteurs clés leur permet de participer pleinement à tous les aspects de la mise en œuvre du programme et encourage les acteurs locaux (responsables communautaires élus, académies d’enseignement, centres de formation pédagogique, membres du comité de gestion scolaire, etc.) à s’approprier le programme. Les communautés ont pu contrôler la presque totalité des centres en transférant les compétences localement et en favorisant la mobilisation au niveau des communautés des ressources et des négociations avec d’autres partenaires. Les membres des communautés négocient l’emplacement du centre, recrutent les Karamogos , sélectionnent une proportion égale d’apprenants hommes et femmes et supervisent les opérations au sein du centre. La délégation de l’autorité fait partie intégrante de la stratégie de World Education Mali et permet d’institutionnaliser le programme.

Le défi qui se pose systématiquement est d’intégrer les nouveaux alphabétisés au monde du travail, afin qu’ils puissent devenir des membres productifs de la société malienne et qu’ils contribuent au développement socioéconomique du pays. Certains anciens participants au programme d’alphabétisation sont ensuite devenus professeurs dans les centres de formation pour le développement. Le défi plus général consiste à augmenter le choix de professions pour cette population nouvellement alphabétisée.

En outre, le modèle actuel délègue la responsabilité consistant à inciter les membres de la communauté à devenir Karamogos. Tandis que les Karamogos doivent s’accorder sur les conditions de l’incitation, World Education a trouvé que, dans certains cas, la rémunération est minimale, tandis que dans d’autres, les Karamogos ne reçoivent aucune rémunération. Pour World Education, la difficulté est de contrôler les accords entre les membres de la communauté et les Karamogos, et de s’assurer que les Karamogos reçoivent une incitation suffisante.

Contact

World Education Mali
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